Chroniques de l'ancienne République -Chapitre V-

Une chaîne de montagne balafrait le paysage de sa masse grisâtre, cicatrice boursouflée de pierres et de roches au pied de laquelle s’étalait le campement républicain. Tels des champignons accolés au tronc du chêne et émergeant de l'humus champêtre, casernes, hangars et autres bâtiments fleurissaient de part et d’autre du massif montagneux. La fonctionnalité militaire usurpait la place à tout esthétisme dans les couleurs uniformes des murs, dans l’architecture des édifices ou encore dans leurs dispositions. La guerre était de nature impersonnelle et le campement le lui rendait au mieux.

A ses deux extrémités, de larges entrepôts servaient de spatioports comptant une trentaine de vaisseaux; des réfectoires et dortoirs logeaient plusieurs escadrons de troopers et étaient devenus au fil des mois les pièces de vie de ces soldats loin de leur foyer; des remparts avoisinant les deux mètres délimitaient de leur hauteur la zone républicaine tandis que tours de guet et canons s’en voyaient les protecteurs.

Une pluie blafarde s’abattait maintenant depuis trois jours et ajoutait son empreinte humide à la mélancolie générale, comme si le temps lui-même s’attristait de la disparition de la 501ème compagnie.

Tous, des mécaniciens aux soldats, des intendants aux pilotes, se préparaient pour la suite des événements, s’impatientant ici du manque d’action, s’inquiétant là de l’avancée impériale,…

Pourtant, dans ce décor à l’odeur de soufre guerrière, une jeune femme s’éloignait des prérogatives de ses camarades. Vêtue du masque de l’hypocrisie et de la tromperie, cela faisait plusieurs mois qu’elle avait infiltré l’armée, qu’elle avait dû feindre de se complaire dans la naïveté républicaine, qu’elle avait endossé le manteau de Kath Lener, petite bureaucrate timide, et qu’elle cachait, sous cet habit d’apparat, sa véritable identité.

L’heure était venue que l’agent Suny prenne du service.

Dans cet uniforme impeccablement taillé qui lui cintrait la taille tout en accentuant les formes de ses hanches et le galbe de ses seins, l’espionne avait arpenté le campement, dossiers sous le bras et mallette de cuir en main pour protester une quelconque activité administrative, voguant en fait à la préparation du plan B. Cela faisait des mois que la jeune femme s’était préparée à ce jour. Si le plan A avait été couronné de succès, il lui aurait suffit d’infiltrer les fichiers de Jackon et d’en copier les données. Le plan B était, certes, plus contraignant car il imposait une destruction totale du poste avancée républicain sur cette planète. Mais en éradiquant l’ennemi, même sans connaître la raison de leurs présences, cela suffirait à stopper leur mission, quelle qu’elle soit. 

Pour se faire et dans l’attente de la charge impériale, des explosifs avaient été placés à des endroits stratégiques : Antennes-relais, salles d’armes, réfectoires ou encore infirmeries. Dans moins de deux heures, le feu et le sang envahiraient la scène de théâtre de cette mascarade, le rideau tomberait et enfin la comédie prendrait fin. Un simple appel avait balayé l’illusion, ce mirage de Kath Lener.

Mais avant de rendosser l’uniforme impérial, avant de rejoindre les rangs de l’Empereur, il lui restait quelques formalités à régler : brouiller les appels entrants afin que la surprise soit totale et pirater les systèmes de défenses. 

Ce fut donc emplie d’une foi inébranlable et le cœur battant au rythme d’une conviction patriotique que la belle inséra son passe dans le réceptacle. Le sas s’ouvrit en un bruit où se mêlait asthme pneumatique et murmures électroniques pour dévoiler à son regard émeraude la salle des transmissions et de sécurité. La première pièce, quoi qu’exigüe, bourdonnait d’activités. Une dizaine de personnes pianotaient sans relâche sur les claviers holographiques, effleurant de leurs doigts les touches bleutées, jouant avec les données, les statistiques, les analyses, soldats de chiffres et de codes aux armes binaires et à l’armure numérique. Quelques-uns saluèrent d’un signe de tête la jeune femme avant de replonger dans les eaux pixélisées de leur écran. Serpentant entre les bureaux de sa mince taille, elle se fraya un chemin entre les piles de dossiers en attente, se dirigeant vers le bureau du responsable du secteur : Feld Ohard. D’une trentaine d’années, le militaire, affilié à la sécurité du réseau, était un homme d’une grande habileté avec les codes mais d’une maladresse extrême avec la gente féminine. Il s’était épris de Kath dés le premier jour et cette dernière avait su se rapprocher de lui, percer ses défenses d’argile par quelques battements de cils et décolletés plongeant sans jamais franchir le cap d’un amour charnel. L’homme se contentait de cette relation platonique car jamais de sa vie, il n’en connut plus mais la façon dont il dévorait des yeux sa subalterne au travers la baie vitrée de son bureau en disait long sur ses désirs.

L’agent Suny avait, quant à elle, dû se résoudre à écouter ce lourdaud de Feld pendant un nombre incalculable de dîner, elle avait subi les baisers baveux de ce cafard républicain et maintenant, l’heure de la récolte était venue.

Elle cogna timidement à la porte qui s’ouvrit quasiment aussitôt sur un Feld Ohard au sourire niaiseux.

-Kath, dit-il sans perdre son rictus amoureux. Ne devions-nous pas nous voir ce soir?

-Oh, Feld, il fallait…il fallait que je te vois maintenant, balbutia-t-elle en se réfugiant dans ses bras.

La surprise le cueillit en même temps que le subtil parfum de sa belle qui lui titillait l’odorat et faisait monter en lui une vague d’émotions.

-Entres, entres donc.

Il attira la jeune femme à l’intérieur non sans échanger avec l’un de ses collègues et amis un regard interrogateur avant que la porte ne se ferme.

-Feld, chéri…, commença-t-elle. Nous nous côtoyons depuis plusieurs mois maintenant et j’ai voulu que tu falsifies mon dossier d’intégration pour demeurer auprès de toi, ici, sur cette foutue planète mais…

-Qu’y a-t-il, Kath ?

Une ride d’anxiété barra le front du militaire. Aussitôt ses pensées fusaient en tout sens : « elle veut me quitter. J’ai pas été assez prévenant. Non, trop, trop pressé de passer à l’acte. Bon sang, elle m’avait dit qu’elle voulait plus de temps et moi, j’ai du faire un geste déplacé. Crétin, crétin »

-Avec l’empire, cette guerre, la défaite de la 501ème, j’ai peur de…, je ne veux pas…

Des larmes perlaient de ses beaux yeux tandis qu’elle levait son regard vers Feld. Elle se mordilla la lèvre inférieure, rongée, semblait-il, par la culpabilité d’avouer un secret brûlant.

Puis, elle ouvrit d’un geste expert les deux premiers boutons de sa veste laissant toute latitude à son amant de plonger son intention et ses ardeurs sur ses attributs.

-Je suis prête, maintenant, tout de suite, susurra-t-elle.

- Kath, souffla-t-il tout en s’approchant de la baie vitrée avant d’effleurer le verre incassable de haut en bas, baissant alors sa transparence jusqu’à ce que l’opacité devienne celle d’un tableau d’ébène. A l’extérieur, son ami sourit à pleine dent, comprenant que Feld allait avoir un dossier spécial à gérer.

Une fois l’intimité de mise, la jeune femme lui prit la tête, lui intimant de descendre vers le chemisier ouvert en direction de son cœur.

Feld enfouit son visage dans ce cadeau offert, ne pouvant voir le masque de tromperie fondre du visage de Kath, ne voyant l’agent Suny faire son apparition et sans se rendre compte que les bras s’enroulant autour de son cou n’étaient plus ceux de son amante mais de sa meurtrière.

D’une secousse experte, elle brisa les cervicales du malheureux qui s’effondra mort, avec pour seul souvenir, le goût de la peau de sa faucheuse.

Sans un remord, Suny tira le corps du républicain jusqu’au bureau, lui prit la main droite et l’appliqua contre le scan. Aussitôt, le bureau se scinda en deux parties et fit apparaître l’holordinateur.

Elle se mit à pianoter les touches, faisant défiler les menus, s’immisçant dans le système comme elle avait su pénétrer le cœur et la confiance de Feld. Une fois dans les systèmes de sécurité, elle connecta sa clé, déversant alors un baiser de mort sur le réseau, une infection qui ne prendrait acte qu’au moment voulu…Bientôt.

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